Assurance et durabilité : et s’il s’agissait d’une question de données ?

Politique et économie
Point de vue
Durée de lecture : 6 min 6 min
13/11/2024

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Alors que le changement climatique remodèle le monde, les secteurs de la construction et de l'assurance sont confrontés à un double impératif : atténuer les risques tout en promouvant la durabilité. Pour approfondir ce sujet et discuter du rôle central du secteur de l'assurance dans le financement de la construction durable, nous avons rencontré Liz Henderson, Directrice Internationale Climate Risk Advisory chez Aon, lors de la Climate Week à New York.
Liz Henderson, Directrice Internationale Climate Risk Advisory chez Aon (fournisseur mondial de services de gestion des risques), a près de vingt ans d'expérience dans l'analyse des risques et le conseil stratégique pour les compagnies d'assurance dommages américaines.

En tant que Directrice Internationale Climate Risk Advisory chez Aon, Liz Henderson se concentre sur la production d’analyses avancées des risques liés au changement climatique. Elle souhaite encourager une vision proactive de l’assurance dans le développement durable, en soulignant l’importance de la collaboration entre les partenaires, de la bonne utilisation des données et de la prise en compte des risques dès les premières étapes des projets.

Comment voyez-vous le rôle de l’assurance dans la promotion d’une construction résiliente face au changement climatique ?

L’assurance est un moteur essentiel de la résilience et des investissements en matière de sécurité dans tous les secteurs. En nous appuyant sur les données scientifiques les plus récentes concernant la manière dont le changement climatique affecte les différents risques, nous pouvons quantifier l’impact des investissements en matière de résilience. Et si nous sommes capables de mesurer cet impact, alors nous sommes en mesure d’adapter les coûts d’assurance et permettre ainsi un plus grand accès aux couvertures d’assurance.

Lorsque les assureurs valorisent les investissements en matière de résilience, cela profite non seulement à nos clients, mais stimule également la demande pour des pratiques de construction plus sûres et plus durables dans tous les domaines.

Pourquoi est-il important de faire intervenir les assureurs plus tôt dans le processus de construction ?

Historiquement, l’assurance n’entre en jeu qu’après l’achèvement des bâtiments, et l’évaluation des risques n’intervient qu’à la fin du projet. Mais en impliquant les assureurs dès le début, nous pouvons mieux aligner les incitations financières sur les résultats en matière de résilience. Les assureurs apportent une « mentalité du risque » unique et une mine de données qui peuvent aider les parties prenantes à prendre des décisions éclairées sur les matériaux, la conception et les stratégies d’atténuation des risques. Ce changement impliquerait de recalibrer les structures de financement pour intégrer la résilience, ce qui pourrait réduire les coûts à long terme en diminuant le besoin de reconstructions après les catastrophes.

En impliquant les assureurs dès le départ, nous pouvons mieux aligner les incitations financières sur les résultats en matière de résilience.

Quels défis les assureurs doivent-ils relever en particulier dans les régions vulnérables ?

L’un des principaux défis, en particulier dans le Sud Global, est l’accès à des données de qualité et à une modélisation avancée. Des données précises sont essentielles pour comprendre les profils de risque locaux, qui à leur tour affectent tout, de la tarification aux résultats du recouvrement. Nous travaillons en étroite collaboration avec les banques de développement et les gouvernements pour élargir l’accès à ces données et faire en sorte que les communautés puissent bénéficier des indemnisations des assurances, qui renforcent la résilience.

Ce que nous constatons de plus en plus, c’est que nos clients ont du mal à accéder à des données et à des informations ayant un impact réel. Des données qui leur permettraient d’aligner leurs décisions sur la manière dont les assureurs envisagent le risque au fil du temps.

Plus nous pourrons fournir des données et une compréhension locales solides, plus nous pourrons soutenir efficacement l'investissement dans la résilience à l'échelle mondiale.

Interview video de Liz :

Comment les investissements de résilience peuvent-ils être valorisés alors même que les catastrophes ne se sont pas encore produites ?

C’est l’un des aspects les plus difficiles. Souvent, la valeur des investissements de résilience n’apparaît qu’après une catastrophe, lorsque les pertes sont nettement inférieures à ce qu’elles auraient été autrement. Cependant, si nous pouvons mesurer et documenter l’impact direct de ces investissements en termes de réduction des risques, les assureurs peuvent ajuster leur tarification pour récompenser cette résilience de manière proactive.

Il s’agit d’un passage de la réaction à la prévention, et c’est là que réside la véritable valeur, mais cela nécessite des analyses avancées et un engagement à long terme de la part des parties prenantes.

31% des 380 milliards de dollars de pertes économiques mondiales dues aux catastrophes naturelles étaient couverts par l'assurance en 2023.
Source : Rapport 2024 “Climate and Catastrophe Insights” d'Aon

Quelles sont les prochaines étapes pour le secteur de l’assurance en matière de soutien à la construction durable ?

L’avenir réside dans l’approfondissement de notre compréhension des risques grâce à des données plus solides et à une approche centrée sur la communauté. En fournissant des informations détaillées sur les vulnérabilités locales, les assureurs peuvent donner aux villes, aux promoteurs et aux communautés les moyens de prendre des décisions axées sur la résilience. Cette approche permet non seulement d’améliorer la viabilité financière des infrastructures intelligentes sur le plan climatique, mais aussi de créer des sociétés plus résilientes.

L'avenir réside dans la poursuite de l'approfondissement de notre compréhension des risques grâce à des données plus solides et à une approche centrée sur les communautés.

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